Tout le monde en parle : le décret tertiaire expliqué

Tout le monde en parle : le décret tertiaire expliqué

 

Ce que l’on désigne sous le nom courant de Décret Tertiaire correspond au Dispositif Eco Efficacité Tertiaire (DEET). Ce dispositif a pour particularité d’imposer une réduction progressive des consommations énergétiques progressives des bâtiments tertiaires, qui représente 15% de la consommation énergétique finale en France.

 

Les émissions de gaz à effet de serre ont considérablement augmenté entre 1990 et 2017, en raison notamment de la multiplication des constructions.

La nouvelle règlementation a pour but d’atteindre 60% d’économie d’énergie pour les bâtiments tertiaires à l’horizon 2050.

Il est donc impératif pour les entreprises de savoir si les bâtiments dont elles ont la charge sont concernées par le décret tertiaire, d’avoir connaissance du contenu des obligations le cas échéant, ainsi qu’un plan stratégique de réduction des consommations d’énergie afin d’atteindre les objectifs préconisés.

 

Quel est le champ d’application du décret tertiaire ?

 

 

A titre préliminaire, il convient de rappeler qu’un bâtiment à usage tertiaire est une construction dont une partie ou la totalité est réservée à l’exercice d’activités tertiaires.

 

Selon l’INSEE, le secteur tertiaire recouvre un vaste champ d'activités qui s'étend du commerce à l'administration, en passant par les transports, les activités financières et immobilières, les services aux entreprises et services aux particuliers, l'éducation, la santé et l'action sociale.

 

Il est composé du tertiaire principalement marchand (commerce, transports, activités financières, services rendus aux entreprises, services rendus aux particuliers, hébergement‑restauration, immobilier, information‑communication) ; et du tertiaire principalement non‑marchand (administration publique, enseignement, santé humaine, action sociale).

 

Le décret tertiaire s’applique aux propriétaires et locataires de bâtiments ou locaux d’activité à usage tertiaire dont la surface d’exploitation est supérieure ou égale à 1000 m².

 

La nature publique ou privée des bâtiments n’a pas d’incidence sur l’application du décret tertiaire.

 

Il est à noter que la superficie prise en compte peut être cumulative si le bâti héberge plusieurs entreprises, ou bien si le site est composé de plusieurs bâtiments.

 

Du reste, ne sont pas soumis au décret les constructions provisoires, lieux de culte et bâtiments de défense, sécurité civile ou sécurité intérieure du territoire.

 

Quel est le contenu des obligations du décret tertiaire ?

 

La réglementation requiert une réduction de consommation d’énergie finale en appliquant une des deux méthodes présentées à l’article L.174‑1 du code de la construction et de l’habitation :

 

  • réduire de 40% d’ici 2030, 50% d’ici 2040, et 60% d’ici 2050 la consommation énergétique finale du bâtiment, par rapport à une année de référence qui ne peut être antérieure à l’année 2010 ;

 

  • ou, atteindre un niveau de consommation énergétique fixé en valeur absolue pour chaque type d’activité.

 

Toutefois, les objectifs mentionnés peuvent être modulés en fonction de certains paramètres.

 

Tout d’abord, en raison de contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales relatives aux bâtiments concernés. Ensuite, en cas de changement de l’activité exercée dans ces bâtiments ou du volume de cette activité. Enfin, dans l’hypothèse de coûts manifestement disproportionnés des actions par rapport aux avantages attendus en termes de consommation d’énergie finale.

 

Dans l’atteinte de ces objectifs, il peut être recommandé d’améliorer la performance énergétique des bâtiments, ou d’installer des équipements performants et mettre en place des dispositifs de contrôle et gestion active des appareils, par exemple un système de coupure automatique des éclairages lorsque les bureaux sont vides. Enfin, il est également envisageable de mettre en place des actions ayant pour finalité de faire évoluer le comportement de consommation des occupants.

 

En effet, les gestes éco‑responsables peuvent mener à la sobriété énergétique et permettent de faire baisser la consommation. Il peut par exemple être question de limiter l’usage de la climatisation, baisser la température du chauffage en hiver, ou encore d’éteindre les lumières lorsqu’un bureau est inoccupé.

 

Les sources de consommation d’énergies les plus importantes sont le chauffage, les éclairages et la climatisation, ainsi que les échanges numériques. Pour parvenir à un usage raisonné de l’énergie des bâtiments, il peut être utile de mener un projet global de rénovation énergétique.

 

Différents leviers peuvent ainsi être mobilisés. Une optimisation des équipements existants peut être envisagée, ainsi que l’installation de dispositifs de chauffage ou ventilations innovants fonctionnant grâce aux énergies économes ou renouvelables. Il est également possible de réaliser des travaux sur le bâti, en vue par exemple d’optimiser l’isolation thermique.

 

Quel est le cadre mis en place pour le recueil des données et le suivi de l’obligation ?

 

Une plateforme informatique a été mise en place par l’Etat pour le suivi des objectifs de réduction des consommations. Il s’agit de la plateforme baptisée OPERAT, gérée par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME). Elle permet aux responsables assujettis de transmettre les informations demandées et de satisfaire ainsi à leur obligation de reporting.

 

Ces informations sont : les usages du bâtiment et le descriptif de l’activité tertiaire exercée, la surface des bâtiments concernés, les données annuelles de consommation d’énergie pour source énergétique depuis 2010, l’année de référence choisie pour déterminer les objectifs à atteindre, ainsi que les modulations éventuelles.

 

Il est conseillé d’effectuer une collecte des données en interne, voire auprès des fournisseurs et distributeurs d’énergie. Une bonne déclaration implique de disposer d’un ensemble de données qui soit le plus complet possible. Le recours à des logiciels tiers est envisageable, dans le but de vérifier la complétude des données à disposition.

 

Cette déclaration devra être effectuée chaque année sur la plateforme.

 

La plateforme OPERAT délivre également une attestation numérique de performance énergétique, complétée par une notation appelée Eco Energie Tertiaire. Celle‑ci permet de se repérer par rapport aux objectifs en valeurs absolues fixées par le décret et de suivre son évolution. Il existe également un document informatif sur les émissions de gaz à effet de serre.

 

Au 30 septembre de chaque année au plus tard, les assujettis au décret tertiaire devront déclarer leur consommation annuelle d’énergie. La règlementation définit les différentes échéances décennales en fonction desquelles les acteurs du tertiaire doivent atteindre des objectifs :

  • En 2030 : 9ème dépôt annuel confirmant les 40% d’économie d’énergie pour chaque site concerné ;
  • En 2040 : 19ème dépôt annuel confirmant les 50% d’économie d’énergie pour chaque site concerné ;
  • En 2050 : 29ème dépôt annuel confirmant les 60% d’économie d’énergie pour chaque site concerné.

 

Quelles sont les sanctions encourues en cas de manquement ?

 

En cas de non‑transmission des données sur la plateforme, le propriétaire ou preneur à bail recevront une mise en demeure, et devront transmettre les éléments sollicités dans les 3 mois. Dans le cas contraire, l’Etat procédera à la publication sur un site internet des services de l’Etat des mises en demeure restées sans effet. Cette sanction s’inscrit dans le cadre du « naming and shaming ».

 

Si l’objectif n’est pas respecté, les assujettis seront mis en demeure et intimés de produire sous 6 mois un plan d’action capable de réduire leurs consommations énergétiques. En cas de manquement, ils recevront une deuxième mise en demeure avant publication de leur nom sur ledit site web. Une amende administrative pourra également être demandée, allant de 1 500 € pour les personnes physiques à 7 500 € pour les personnes morales.

 

En cas de non‑atteinte des objectifs, il est possible pour le préfet de demander une mise en demeure imposant au bailleur et au locataire l’établissement d’un programme d’actions adapté, et de s’engager à le réaliser.

A défaut de justification de la part de l’une des deux parties prenantes, une amende de 1500 euros pour les personnes physiques et de 7500 euros pour les personnes morales est prévue à chaque contrôle.

 

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